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Madrillet, étages

La collection “sonde atomique” inscrite au titre des Monuments Historiques

L’ensemble des quinze éléments de la « sonde atomique », instrument emblématique de la recherche normande des quarante dernières années, a été inscrit au titre des Monuments historiques, suite à la parution de l’arrêté préfectoral n° 31 du 30 août 2021. Protéger une collection de ce type est une première en Normandie, une véritable reconnaissance de l’appartenance du patrimoine scientifique à une culture commune à tous.

Inventée aux États-Unis par Erwin Müller dans les années 1960, la sonde atomique est un instrument unique permettant l’identification des éléments chimiques constituant les matériaux à l’échelle de l’atome. Instrument complexe à mettre en œuvre, sa fabrication requiert une haute technicité scientifique.

Une aventure humaine et scientifique

La première sonde atomique française, présentée en 1974 dans un congrès scientifique, a été conçue et réalisée par l’équipe du Pr Jean Gallot de l’université de Rouen, au sein du laboratoire GPM (Groupe de Physique des Matériaux – UMR 6634). Dessinée par Jean-Marie Sarrau, la sonde a été usinée et soudée par les techniciens de l’atelier de physique de la faculté des sciences. Elle permet alors la détection des premiers atomes en 1974-75 grâce à une électronique développée localement. Instrument à l’époque encore confidentiel et peu connu, sa renommée et son intérêt pour la recherche en sciences des matériaux prennent leur essor à travers un grand nombre de collaborations, notamment avec le secteur industriel de l’aéronautique dans les années 1980 puis le nucléaire civil dans les années 1990.

L’évolution de l’instrument vers une version de sonde 3D (3 dimensions ou tomographique) met cet instrument, au milieu des années 1990, au même niveau que les autres techniques d’analyse comme la microscopie électronique à transmission et les techniques d’analyse associées.

Une collection sauvegardée

En 2010, le réseau Résitech (Réseau Scientifique Industriel et Technique en Normandie), intégré au programme national de sauvegarde du patrimoine scientifique et technique contemporain porté par le CNAM (www.patstec.fr), débute un travail de collecte d’archives orales et d’inventaire des éléments patrimoniaux illustrant l’évolution de cette sonde.
Ces collections, inventoriées “hors musée”, n’ont pas de statut au sens juridique du terme. Depuis le 30 août dernier et la signature de l’arrêté d’inscription n° 31 par le préfet de Région, la collection de 15 items datant de 1974 à 1993 est reconnue comme collection patrimoniale. Protéger une collection de ce type est une première en Normandie.

Un travail collaboratif

Cette protection est une reconnaissance des travaux de la Mission de sauvegarde du patrimoine scientifique et technique contemporain et du réseau régional, avec l’implication d’un grand nombre d’acteurs : physiciens, sociologues, conservateurs, techniciens…mais aussi d’artistes. Ainsi, le soutien du service régional de l’inventaire a permis la mise en place d’une première collecte d’archives orales en 2011-2012, étape déterminante pour la mobilisation d’acteurs du laboratoire GPM et l’émergence de nouvelles archives. Les partenariats successifs avec le CNRS Image en 2014, le Musée des Beaux-arts de Rouen en 2018, le Musée des arts et métiers en 2020 ont également contribué à la mise en valeur de l’histoire et de ce patrimoine. Enfin, c’est l’accompagnement scientifique de la mission de l’inventaire général du patrimoine culturel qui a permis d’aboutir à l’inscription au titre des Monuments historiques. Au-delà de l’acte juridique, celle-ci est une reconnaissance de l’appartenance du patrimoine scientifique à un patrimoine, une culture commune à tous.

Sondée, Ann Guillaume, Galerie Agnès B , Paris, 2016 (Droits réservés)

Ces collections peuvent être découvertes par le grand public sur demande, ou lors d’opérations nationales comme la Fête de la Science ou Journées européennes du patrimoine.

Rencontre avec Anne-Sophie Rozay, Chargée Inventaire Patrimoine Scientifique pour Résitech

Vous travaillez pour le RéSITech, pouvez-vous nous rappeler ce qu’est ce réseau, quel est son rôle ?

Résitech est un réseau né en 2008 sous l’impulsion de l’INSA Rouen Normandie, de la Mission de sauvegarde du patrimoine scientifique et technique contemporain du CNAM – (www.patstec.fr) et de l’Université Rouen Normandie. Il rassemble les acteurs impliqués dans la sauvegarde et la mise en valeur du patrimoine scientifique et technique ainsi que dans la diffusion de la culture scientifique. En 2020 l’Université Caen Normandie rejoint le réseau.

L’un des principaux objectifs est de sensibiliser les établissements de l’enseignement supérieur et les laboratoires de recherche à leur patrimoine.
Cela passe par la mise en place d’un inventaire des instruments qui peuvent avoir un potentiel intérêt d’un point de vue patrimonial, ainsi que par des collectes d’archives orales et de documents associés permettant de contextualiser les usages de ces instruments. Ce travail permet de sauvegarder un patrimoine relativement récent de la recherche scientifique, des 50, 60 dernière années, très souvent en péril vu la rapidité des évolutions technologiques.

Parallèlement à cette mission de sauvegarde, le réseau Résitech mène régulièrement des actions de mise en valeur de ce patrimoine (exposition, conférence, …)

Pourquoi avoir porté ce dossier à la Commission Régionale du Patrimoine et de l’Architecture pour l’inscription au titre des monuments historiques ?

N’étant pas “musée de France”, l’inventaire des collections n’assure pas de statut juridique aux collections. Inscrire la collection des sondes atomiques du Groupe de Physique des Matériaux au titre des Monuments Historiques permet d’assurer une protection patrimoniale : ces objets sont reconnus comme revêtant un intérêt historique et patrimonial, il convient d’assurer leur conservation et de les faire connaitre du public.

Pour le réseau Résitech

  • Mourad Boukhalfa, directeur de l’INSA Rouen Normandie
  • Joël Alexandre, président de l’université Rouen Normandie
  • Philippe Pareige, Vice-président Recherche de l’université Rouen Normandie
  • Françoise Baillot, directrice de l’UFR des Sciences et Techniques de l’université Rouen
  • Xavier Sauvage, directeur du Groupe de Physique des Matériaux UMR CNRS 6634
  • Pascale Heurtel, adjointe à l’administrateur général pour le patrimoine, l’information et la culture scientifique, CNAM Conservatoire National des Arts et Métiers
  • Catherine Cuenca, responsable de la Mission nationale de sauvegarde du patrimoine scientifique et technique Normandie
  • Jean Davoigneau, Chargé de Mission, Mission Inventaire général du patrimoine culturel
  • Vincent Simonet, conservateur des Monuments historiques, DRAC Normandie
  • Séverine Fontaine, Conservatrice des antiquités et objets d’arts, Direction de la Culture et du Patrimoine, Département de Seine-Maritime

 

Pour regarder la vidéo “Un instrument et des hommes, l’aventure de la sonde atomique à Rouen” du CNRS et de Résitech, cliquez ici.

Date de publication : 22/10/21