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Rencontre avec un enseignant-chercheur de l'Université

Estelle Langlois, laboratoire ECODIV

Responsable de la Licence 3 Ecologie, enseignante-chercheuse du laboratoire ECODIV.

"J’accorde beaucoup d’importance à notre double mission : nous sommes à la fois des enseignants et des chercheurs et les deux missions ont leurs avantages et leurs contraintes. Je ne conçois pas ce métier sans l’un des deux aspects. "

L’université de Rouen Normandie a travaillé avec des étudiantes du master Ingénierie de la Santé, Analyses et Qualité en Bio-Industries, dans le cadre de la gestion de projet, pour valoriser les activités de recherche de trois laboratoires, et les personnes qui les font vivre : ECODIV, GlycoMEV, CETAPS.

Estelle Langlois travaille en écologie végétale au sein du laboratoire ECODIV depuis 2002. Elle est maître de conférences HDR à l’université de Rouen Normandie et responsable de la Licence 3 Écologie.

Elle nous relate les événements de son parcours qui l’ont amenée à devenir enseignante-chercheuse. Après l’obtention d’un DEUG B (L1+L2), d’une Licence BOP (Biologie des Organismes et des Populations) et d’une Maîtrise Biologie des Populations et des  Écosystèmes (M1) à l’Université de Rennes1, elle est admise en DEA (M2 recherche) « Biologie des Populations, Génétique et Éco-éthologie » toujours à l’université de Rennes1. Initialement plus attirée par une formation professionnalisante (type DESS), elle a finalement effectué un DEA suite à la réalisation d’un stage en laboratoire de recherche à la fin de sa Maîtrise, sur la restauration écologique d’un site historique dégradé par la sur-fréquentation touristique (site mégalithique de Carnac). Cette première expérience lui fait prendre conscience que la recherche peut permettre d’avoir une action concrète sur notre environnement et notamment sur la sauvegarde des écosystèmes. Au cours de son DEA, elle réalise un stage dans un laboratoire de recherche et travaille sur la compréhension des mécanismes de mise en place des communautés végétales pionnières sur les vasières de la baie du Mont Saint Michel, puis poursuit sur cette thématique pendant ses quatre années de thèse.

 

  • Qu’avez-vous fait après votre thèse ?

Suite à mon doctorat, j’ai été recrutée deux années de suite sur un poste d’ATER (Attaché Temporaire d’Enseignement et de Recherche) à l’université de Rouen. En parallèle des enseignements donnés, j’ai débuté un nouveau travail de recherche en collaboration avec la chambre d’agriculture de Seine Maritime pour évaluer l’effet de la gestion agricole (culture, prairie de fauche, pâturage) sur l’organisation des communautés végétales de la basse vallée de Seine. Suite à ces deux années, j’ai passé le concours de maître de conférences et ai été recrutée à l’Université de Rouen

  • Quelles sont vos thématiques de recherche actuelles ?

Je travaille toujours sur les communautés végétales et les facteurs impliqués dans leur organisation et structuration. Depuis quelques mois, je coordonne un nouveau projet de recherche dont l’objectif est de comprendre le fonctionnement écologique des zones prairiales de l’estuaire de Seine afin de tenter de prédire les réponses de différentes groupes (plantes, animaux, microorganismes) et du fonctionnement écologique de ces milieux en lien avec les conséquences du changement climatique (e.g. augmentation du niveau marin, modification du gradient de salinité). En effet, l’augmentation du niveau de la mer pourrait entrainer une remontée du front salin dans l’estuaire et impacter les espèces végétales qui s’y trouvent ainsi que les processus écologiques (comme le cycle de la matière) qui s’y déroulent.

 

  •  Avez-vous participé à des projets en collaboration avec des entreprises ?

Oui, depuis quelques années, nous travaillons en collaboration avec plusieurs entreprises comme le Grand Port Maritime de Rouen et des entreprises d’extraction de granulats présentes sur la vallée de la Seine Normande. Ces projets ont pour objectif de restaurer les milieux humides de la vallée de Seine suite à leur destruction par l’exploitation des granulats (utilisés dans les matériaux de construction) et qui laissent place à des ballastières (étendue d’eau profondes de plusieurs mètres). La restauration écologique menée consiste à tester différentes techniques de comblement des ballastières à l’aide de sédiments recouverts de différents types de sols locaux et identifier la technique la plus adéquat permettant de retrouver les communautés végétales et des fonctions écologiques associées les plus proches de celles qui existaient préalablement. Selon les projets, l’objectif était de retrouver des milieux favorisant la biodiversité ou bien permettant la reprise d’une activité agricole extensive. Ces études permettent d’orienter les choix de sols à utiliser dans le cadre de restauration de milieux tout en considérant le coût économique que cela engendre.

  • Comment percevez-vous le rôle d’enseignant chercheur ?

J’accorde beaucoup d’importance à notre double mission : nous sommes à la fois des enseignants et des chercheurs et les deux missions ont leurs avantages et leurs contraintes. Je ne conçois pas ce métier sans l’un des deux aspects. Au moment de mon recrutement j’ai eu l’opportunité de monter une Licence en écologie, basée sur la biologie des organismes et les facteurs écologiques interagissant sur leur développement. Cette expérience fut très enrichissante et formatrice d’un point de vue pédagogique et relationnel. Les échanges avec les étudiants lors des séances d’enseignements (CM, TD et TP) nous permettent un contact direct et de faire passer des notions qui parfois les aident à faire évoluer leur projet de formation. Côté recherche, l’encadrement de stagiaires et d’étudiants en thèse est également une activité enrichissante qui nous permet de nous remettre en question et d’être en constante progression.

  • Quelles sont vos difficultés au quotidien ?

La plus grande difficulté est le manque de temps pour le développement de certaines activités que ce soit en enseignement ou en recherche. Le quotidien est en effet occupé, pour une grande partie, à des tâches administratives. Ces activités, comme la gestion de formation, la gestion de laboratoire, sont très intéressantes mais très chronophages, peu reconnues dans notre métier et qui prennent parfois le pas sur la partie recherche. L’autre point de difficultés est le financement de la recherche qui nécessite de répondre à des appels à projet, souvent très sélectifs, demandant beaucoup de temps de préparation pour des taux de réussite relativement faibles.

 

  • À partir de quel moment allez-vous considérer votre carrière comme réussie ?

Je ne suis pas sure de pouvoir vraiment répondre à cette question. Peut-être le pourrais-je à la fin de ma carrière… Ce qui est sûr, c’est que je ne peux pas concevoir mon activité professionnelle sans un lien étroit et appliqué avec notre société et ses problématiques écologiques. Mon métier me permet de collaborer directement avec différentes structures travaillant sur la gestion des milieux (Réserves Naturelles, Parcs Naturels, Conservatoire d’Espace naturel, Offices …) et ainsi d’avoir une activité de recherche appliquée à la compréhension du fonctionnement des écosystèmes, à leur restauration ou encore à leur conservation.

 

 

Pour finir, Estelle Langlois nous a donné quelques conseils pour les étudiants qui souhaitent s’orienter vers la recherche. Il faut, selon elle, se donner les moyens de réussir, en étant acteur de sa formation, notamment en postulant sur des stages, ne pas hésiter à se renseigner sur tous les aspects du métier que l’on souhaite faire et surtout garder une ouverture d’esprit.