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« C’est quoi un bon microbe ? »

L’université de Rouen Normandie est partenaire de The Conversation, média en ligne proposant du contenu d’actualité élaboré avec des universitaires. The Conversation propose également une rubrique dédiée aux enfants, qui peuvent poser leurs questions via l’adresse tcjunior@theconversation.fr. Voici donc la réponse de Marc G.J. Feuilloley, Professeur à l’université de Rouen Normandie, à la question d’Alexandre.

Alexandre : « C’est quoi un bon microbe ? »

Est-ce que tu t’es déjà demandé si tu étais bon ou mauvais, ou plus simplement gentil ou méchant ? On pourrait dire un peu des deux, selon les moments (même si je suis sûr que tu es le plus souvent très gentil). Eh bien, pour les « microbes » c’est un peu la même chose.

D’abord il faut savoir de quoi on parle. Sous ce nom de microbe, on regroupe tout un nombre d’organismes qu’on ne peut pas voir à l’œil nu, on dit qu’ils sont microscopiques, parmi lesquels des bactéries, des levures, des champignons et même des virus.

Dans le corps humain, ces micro-organismes sont regroupés sous le terme de microbiote et chez un adulte cela représente une masse de 1,5 à 2 kg, c’est plus que le poids de notre cerveau.

Ce microbiote est surtout localisé dans l’intestin, mais on trouve aussi beaucoup de microbes sur la peau, sur les yeux, dans la bouche, le nez, les poumons et même la vessie.

Dessin localisant nos principaux microbiotes, à l’interface entre nos organes et le milieu extérieur (peau, bouche, intestin, poumons, etc.)
À chaque fois qu’un de nos organes est en contact avec le milieu extérieur, un microbiote spécifique se met en place : au niveau de notre bouche, notre peau ou nos poumons ou intestins.
Julie Borgèse/Inserm Mibiogate, Fourni par l’auteur 

On a longtemps pensé que le mieux à faire avec ces micro-organismes, c’était de les éliminer, mais on sait aujourd’hui que ce serait une grave erreur. D’abord il faut rappeler qu’en réalité, il y a très peu de microbes qui rendent malades à coup sûr, on les appelle les pathogènes. La plupart sont dits pathogènes opportunistes, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas tout le temps capables de nous infecter. Cela varie selon l’endroit où ils se développent, un peu comme une mauvaise herbe qui n’est mauvaise que parce qu’elle ne pousse pas où on veut, ou bien parce que des molécules (substances chimiques) produites par notre propre corps les stressent et les rendent agressifs.

On peut même porter dans ou sur notre corps des microbes pathogènes sans jamais être malades. Tout dépend de s’ils sont actifs ou non et de leur nombre.

En fait, beaucoup de microbes nous sont même nécessaires. D’abord, ils occupent des places qui, s’ils n’étaient pas là, pourraient être utilisées par des microbes pathogènes. Ensuite, ils aident notre corps à réagir et lutter contre d’autres microbes.

D’autre part, ces microbes, qui d’une certaine façon font partie de nous-mêmes et sont parfois considérés comme un organe à part entière, produisent des molécules qui nous sont indispensables comme des vitamines ou des acides biliaires nécessaires à la digestion.

En fin de compte, sans notre microbiote nous serions bien malades. Mais le plus étonnant, c’est qu’on a découvert que les microbes communiquent avec les cellules de notre corps, et cela dans les deux sens. Nos cellules sont capables de détecter les microbes sur et dans notre organisme. Cela est nécessaire au renouvellement des cellules de notre intestin et de notre peau et sert aussi à entraîner notre système immunitaire qui nous défend contre les agressions extérieures.

Des microbes de l’intestin seraient même capables de produire des molécules qui passent dans notre sang et agiraient sur notre cerveau et réguleraient notre faim et la prise de poids. Mais le plus étonnant, c’est que les microbes sont aussi capables de détecter les signaux que nos cellules produisent.

De cette façon, les microbes sont capables de sentir notre état de stress. Par exemple, on sait que les boutons d’acné se développent souvent quand on est stressé et on a vu que des bactéries de la peau peuvent sentir les molécules libérées par notre corps quand on est stressé et favoriser la formation de ces boutons. Alors, bon ou mauvais microbe, en réalité tout dépend du nombre, du lieu et de l’environnement. Je ne te dirai pas de ne pas te laver, mais il faut éviter de se doucher avec des gels trop agressifs et de se frotter fortement la peau.

C’est la même chose pour l’intestin, si des antibiotiques tuent une partie de notre microbiote, cela se passe mal et mieux vaut ne pas s’éloigner des WC. Dans la plupart des cas on s’entend très bien avec notre microbiote, il fait partie de nous et comme pour tous les êtres vivants, il faut le préserver.


 

Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : tcjunior@theconversation.fr. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre.The Conversation

Auteur

Marc G.J. Feuilloley, Adjunct associate, Université de Rouen Normandie

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

Date de publication : 18/05/22